mercredi 30 janvier 2013

La Martinique hic et nunc


Aimé Césaire, le Martiniquais de la poésie aux yuccas bleus, s'est invité à la table du Mot Ment le 28 janvier. Alors  évidemment, au milieu du sale hiver nancéien, c'était quelque chose, la tiédeur insulaire. On a fait le tour du monde derrière les verres épais de Césaire :
"Te voici à Marseille au milieu des pastèques,
Te voici à Coblence à l'hôtel du Géant,
Te voici à Rome assis sous un néflier du Japon" 
Te voici à Nancy avec des poètes qui écoutent ta voix d'outre-tombe, Césaire. 

Alors on a écrit nous aussi, pour que tu entendes nos voix, quelques poèmes autour du thème de l'Afrique...


Afrique Afrique
ton sang bat
trop vite dans tes artères
ton sang mêlé aux eaux
du Nil a fait le jus
d'orange d'Europe
Ô vieux Cham que tes
dents ont du grincer.
Afrique portée par des
éléphants millénaires
Afrique oreille coupée.

Théophile.

***

En quadrillé, defragmenté, désert de soleil dépossédé.
Inconnu, mais riche en dedans.
Vaste solitaire, armé d'inquiétude. 
Dernier bastion, dévasté.
Astre pourrissant. 
Inspiration dévolue. Dépourvue de pensées. 
Méconnue, mais triste en dedans. 
Plate salutaire, plénitude stellaire.
A rechercher les trésors, et tomber encore.
Là ou tout résonne, pour commencer à recommencer par le début.

Alysson.

***

Afrique:

Le rêve africain
Ce n'est pas l’aborigène
Mais bien le gêne de l'humain
Le gène qui gène certains

Car l'image de l'être réel
Celui qui ne fait pas de fioritures
Et qui d'âme n'a pas d'armure
Leur renvoie à la leurd'image

Les leurres
Pour qui l'argent est une valeur
Amerthune, Amerthune
La Mère liberté et ses flots de thune

La terre Afrique
C'est une pause, une trêve
Dans cette vélocité de bordures
Débordante de férocité

Afrique, terre d'espoir
Qui a fait d'or l'ordure


Le rêve américain...

Marc.

***

Ladate


          Ladate...
            Colore les fibres fabrique
            des Bribes de Briques d'une case de Broc
     et Jaune collecte de pouces de pieds les peupliers
                        Ensable de pluie l'Histoire des peuples papous
                                                                                       panel
                                                                                       la paille
                        Ladate
               creuse coloquinte chaos
                           des koalas couchés
                                    Au cœur
                        Ladate
                 Groupée dans le galop glissant,
                                   Poli, sirènes contemplent
                        Barquettes en bas, des canotiers ancrés dans
     les maillons de cire embarcations claquées faites de
                               plaies de polystyrène
Silences, et morcelées, écope écope, ma mort scellée, écope les cris des
           Koalas                            Ladate
                                   Écope               Cartons cramés
                                       Rouge plastique et encerclé
Clac, Clac, Clac  
                      Le carillon, sonne, j'ai la colique
Noyau collé, la date, emballé dans ma cadence

Mathieu.

***


Allen à Tanger

De sa terrasse rasé de près
Allen compile et contemple
la pleine poésie du paysage
Africain

Le soleil tanne sa peau tendue de juif new-yorkais
Bronzé ou d'airain dans sa fantastique immobilité
Rétive à toutes transgressions tonitruantes

Allen que ta plaie est suintante
Allen que ton vide est trop plein de vers à appâter
Allen que ta gueule de pédé
Soit l'auréole de ta finitude accomplie

Car je n'éprouve que dégoût à mimer ton éclat
Quand je voudrais rimer avec éclat

Oh ! Allen libère ta limpide spasmophilie
Bill et Tijean recolleront tes morceaux
Éclate et craque ta dernière allumette
Sois la flamme de ton exactitude salvatrice

Le soleil fane et se pose sur l'épaule d'Atlas
Poussière de ci de là au gré des éternuements
Soulagée du poids de souvenir amer de la mère

De sa terrasse barbue et si loin
Allen crie
Allen écrit
Mais Allen fuit.

Florian.

***

Du fric ?
Même pas
Pourtant l'Afrique.
L’Afrique qui gueule
L'Afrique qui fuit
On le raconte raconte sans compter le connaître
On sait les feuilles qui sifflent
Et les poissons noirs mais
le poisson blanc est venu là
Il a teinté d'orange l'ocre des soleils
Il a blanchi de rage les mangues d'arbres bleus
Ici tout était chaud comme un abricot brun
Soudain sans soupir les bruits se sont brisés
Et il n'est plus resté qu'un silence élastique
Mais l'élan de nos sangs a rassemblé les lions
Nous les avons tressés sans cesse en espérant
Et un à un au son des jours
Nous avons vu les soleils réapparaître
Et les animaux rouges
Se repaître à leur ombre

Marie.

***

Hausse d'emploi en Afrique
Démographie en Afrique
Développement industriel en Afrique
Situation politique en Afrique
Famille et santé en Afrique
Histoire coloniale en Afrique
Préhistoire en Afrique
Alchimie et sciences occultes en Afrique
Immortalité...

Trois frères se donnent rendez-vous en Afrique
trois frères au nom d'oiseau
l'un d'entre eux se coupe la barbe à l'aiguille à tricoter
il se coiffe au crochet, il parle tout seul
Il parle tout
seul
Il a fondé des villes, baisé des femmes grosses comme les montagnes
Il a un chien, immortel lui aussi
qui ne donne jamais la patte
et cette prodigieuse bête
raconte des histoires dans la radio
avec le ton monocorde des chiens
Il répète tout le temps....


« Hausse d'emploi en Afrique
Démographie en Afrique
Développement industriel en Afrique..... »

Bent.

***

Afrique

Une petite boite avec un papier qui dit :
    « solidaire »
Et puis quoi encore ?
Afrique sur le paquet de café
Afrique sur la tablette de chocolat
Afrique sur la Manioc
Afrique sur les mangues
Afrique qui nous grignote
Afrique qui nous pique la langue
Afrique, Afrique, Afrique, Afrique,
Afrique, frique, frique, frique
Dans la petite boîte où c'est écrit
      « solidaire »
Pourquoi donner des sous, hein ? Pourquoi faire 
si c'est pas pour nous ?
Pour deux pièces qui se battent en duel 
autant ne rien donner ;
à chacun sa poussière.

Mais dans la soute à bagages
y a pas la boîte qui clique-tique
            Mais y a lui, là, par-terre, 
    recroquevillé, qui ne crèvera
            pas de faim, pas en Afrique,
            peut-être ;
mais qui crèvera de misère,
là-bas, en Europe
où s'agite la boîte en fer,
où c'est écrit "Solidaire".
Ou avant.
Même pas de petite monnaie
pour acheter la Mort
à moindres frais.
Rien sous les bagages,
au milieu de l'aéroport,
que lui, là, 
qui ne verra plus un nuage,
parce qu'il n'est déjà plus qu'un corps.

Chloé.

***

            Pas d'âge le son gong
            crache du purulent mâche j'ai le
            Rien.
            Sable bref coupe, rare et fier
            Rien
            Main qui pleut de bave qui s'allume
            c'est une torche sale
            Sombre sans teint
            Aveugle gratter la phrase crisser
            crisser syllabes – adage
            Rien. J'acariâtre, anonyme
                    Plus
            Pas plus               lu                  j'ai lu
                    lire la pluie
A sac met le monde lui ment ne lui offre.
Rien.      Des parodies de tumulte, des mulets
            Et
Rien. Le son con. Cong. Gong.
Cravache, bête, fait la vie
aux yeux clos, et sombre
réverbère, barbare.

Théo.

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